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 comme en poésie

revue trimestrielle de poésie

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5 juin 2006 1 05 /06 /juin /2006 08:01

Comme en poésie 26 est paru voici le sommaire

On peut se le procurer pour 3€ en mettant un message à J.lesieur@wanadoo.fr

 

Page 2 : (édito) Jean-Pierre LESIEUR
Page3/4/5 : Liliane Atlan
Pages 6/7/8 : Évelyne Morin 
 Page 9: Jacques Canut
Page 10/11 : Jeanpyer Poëls, Jean-Claude Hémery (dessin)
Page 12  : Anne Poiré, Clod’aria
Page 13 : Viviane Ciampi, Ghislaine Fendler
Page 14/15 : Ghyslaine Goulley-Leloup
Page 16/17/ 18: Daniel Brochard
Pages 19 : Mireille Disdero
Page 20/21: Béatrice Kad
Page 22: Daniel Perthuis
Page 23 : Olivier Mathian
Pages 24 : Paul Henri Jutant
Page 25: Esther Moïsa
Page 26/27 : Irène Pauline Bourlas
Page 28/29 : Philippe Soriano
Page 30/31/32 : Thierry Dousset
Page 33 : Claude Vercey, Flam (dessin)
Page 34 : Rimbaud graphie/Pierre Mironer
Page 35 : Fabrice Marzuolo
Page 36 : Marie-Noëlle Agniau Rosy Candau (dessin)
Page 37: Coups de cœur JpL
Page 38/39 : Cécile Sainte Fare Garnot
Page 40 : Joanna Haddad
Page 41 : Comme en correspondance
Page 42 : La petite fabrique de rêve : Fadila Baha
Page 43: Guy Chaty
Page 44/45 : cartes légendées
Page 46 : La pasticherie
Page 47 : Pot-au-feu
Page 48 : Conseils et annonces
Page 49: Comme dans les recueils
Page 50/51 : Comme dans les revues

 

 

 

L'inspecteur des amours de Liliane ATLAN

 

 

                                          Une femme pleure. Soudain elle crie  terrifiée.
Qui êtes-vous ?
- L'Inspecteur des Amours.
- Le quoi ?
- Je viens de vous le dire: L'Inspecteur des Amours.
- Je n'ai jamais entendu ça.
- Cela n'existe que depuis ce matin. Vous êtes ma première cliente. Je suis chargé de la bienséance dans les amours précaires. Je vous propose de me payer, le premier jour, non par de l'argent, mais par des baisers. S'ils sont délicieux, ils seront gratuits. S'ils ne le sont pas, vous payerez.
- Cher?
-Très cher. Sinon, je m'en vais.
- Je ne fais pas des baisers à des personnes que je vois pour la première fois.
- Ou vous me faites des baisers ou je vous tue. Décidez-vous. Je n'ai pas de temps à perdre.
- J'attends mon amant du matin.
- Il ne viendra pas. Je l'ai tué. Soyez ma bien-aimée une heure ou deux par jour. Je ne vous demande pas la lune.

 Elle le tue. Les oiseaux chantent.

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30 mai 2006 2 30 /05 /mai /2006 08:11

La cité en fête attendait ses poètes. Il en sortait de partout des grilles d'égout et de toutes les grilles en général, où ces cloportes de l'adjectif avaient vécu terrés en sous-terrain, remontant du métro par les aérations qui débouchaient sous les pieds des passants comme autant de chausse-trapes.  Largement aveugles au jour, lents à réadapter leurs pupilles à la nation orpheline, à distinguer un chat d'un chat, une artère passante d'un infarctus. Assommés par la lumière et cloués muets d'avoir soudain à parler pour le plus grand nombre. Sevrés de reptation avec de grands trous béants à force de s'être usés les parois abdominales sur les cailloux de l'ombre.

Il en sortait d'incertains dont les yeux avaient pris d'inquiétantes proportions et une fixité de miroir où le feuillage commençait à pousser. D'autres, environnés d'un halo nauséabond dû à quelques siècles de compromission et de mendicité. D'incestueux qui avaient eu des semblants de rapports, dessimili-contacts avec la grande famille. Des pervers, gonflés d'idées fausses sur l'amour et sur ce qu'il est possible d'en faire. Des maculés pour toute éternité dont les taches d'écailles avaient atteint les chromosomes et qui SAVAIENT que leur descendance auraient les mêmes. Des récidivistes qui tentait à tout salpêtre de se cacher dans la première cavité venue. Des masochistes qui hurlaient à la lune en se flagellant avec les loups de l'au-delà afin de réintégrer leur tanière de silence. Des demeurés de l'extase, avec le regard ouvert drôlement plus grand que de coutume les glandes lacrymales bloquées sur un trait rouge. Des déjà trop vieux, sans avoir rien donné qui promenaient par la main leur petite vieille et une allure d'absence frisant la calvitie. La foule anodine s'écartait, inquiète devant tant de misère et de délabrement, des haussements d'épaules saccadaient les sourires. Au hasard des ruelles, des rixes où les mots crachaient le sang, laissaient pour les choucas municipaux des CADAVRES EXQUIS. Les funèbres pompes éloignaient les curieux avec des miaulements de sirène qui empestaient la naphtaline. La cité en fête regorgeait de poètes. Les ruines, qui avaient remplacé les ruines, étaient couvertes de slogans, de professions de foi, de tracts, d'affiches, sans queue ni tête ou la tête à la place de la queue, les yeux à hauteur d'anus, un approximatif mic-mac de verbiage pour snobs invétérés. La foule anodine s'écartait. Jaugeant d'un regard superficiel le fatras, des pétitions circulèrent, elles reçurent nombre de signatures. Un temps de branle-bas et d'odeur d'acides empêtra les carrefours. Les responsables de la sécurité mirent en place publique des plans de premiers secours. On transfusa, perfusa, gratta, opéra, liquida physiquement et moralement, dans un souci de grande angoisse, puis on regroupa tout dans l'enceinte désaffectée et javélisée d'un stade promis à la pioche des démolisseurs.

         La foire aux poètes pouvait commencer. Ce ne fut, d'abord, que borborygmes boréaux, emphases, discours pompeux de cénacles, devant des gradins vides et des buvettes médusées n'ayant jamais rien vu de tel. Puis, l'un d'eux, qui n'avait rien d'autre à dire cria : « AU FEU! L'incendie arriva, prit par le travers en se pourlèchant les babines, deux tonnes de plaquettes à compte d'auteur, culbuta quelques poètes et poètesses dont les mœurs douteuses n'eurent pas trop à rougir, dévora d'un coup de langue un groupe constitué dont la dialectique était incandescemment inopérante, effaça plusieurs pompiers en écriture du menu à la carte, rassembla les énénergies de la cité qui eut peur et ne laissa en stade que le pyromane et ceux qui lui avaient procuré les allu- mettes, le white-spirit et la torche. Fort peu de monde au demeurant pour s'asseoir sur les brandons de la table rase. N'ayant rien à manger ils firent un méchoui, sur la cendre encore fumante, du dernier demeuré qui s'enfuyait en rampant vers la reconstruction d'une autre Babylone troglodyte.

Extrait de L'O.S des lettres de J.P Lesieur Gros textes éditeur.

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20 mai 2006 6 20 /05 /mai /2006 08:08
  LA VIE EST UN DROLE DE CIRQUE

           Loufoque la voiture était-ce le constructeur le résultat valait le détour même si de détours elle ne fit point. Elle ne bougea pas les buissons les vallons le paysage jamais le même des troupeaux et la garrigue j'attendais la Sainte~ Victoire le conducteur livide vociféra il était la victime de forces sataniques je l'observai la chaleur aurait altéré sa raison il me dit tout net le compteur était formel nous étions en bassin parisien depuis le petit matin un long temps harassant.

 

           N'avais-je pas absorbé d'hallucinogènes avec le café? il se troubla jusqu'à la transparence tandis que je m'interrogeais à voix haute.

 

           La Bizarrerie j'aurais juré la reconnaître elle me dépaysait encore.

                                                                        Éliane n'avait jamais aimé la vie terrestre ses turpitudes immuables les bornes kilométriques avaient l'art de durer tous les jours elle non le sommeil son effaceur complice l'amenait doucement jusqu'à la tisane pétale de plaisir verveine vigne rouge olivier millepertuis mauve elle lisait dans les plantes son enfance verte en bouton d'or et orties plus tard elle se mélangerait les dates les soldats allemands cachés dans les tranchées, c'était la bérézina la délivrance elle avait treize ans quelle importance la souffrance était antérieure encore avant jamais eu besoin de lire Cioran. C'était déjà la vie terrestre, la pire de toutes. Elle avait eu ses bonheurs d'enfant le bocage normand pour exploration des heures des journées les herbes hautes jusqu'à la taille les senteurs et le vent la vie sauvageonne seule qui vaille.

 Bien sûr la terre à pleines mains comment comprendraient-ils elle était dans un nuage ils l'ont délogé travail-famille pour la patrie ils avaient déjà donné. Elle ne voulait ni leur parler ni les entendre elle apprit très vite à être sourde ses familiers harcelés par le labeur enregistrèrent sans broncher. Elle avait une langue seulement pour goûter mûres et fraises des bois.

 Elle en ferait des confitures dans sa vie terrestre pleine d'enfants gourmands.  

 

                                                                       Fadila BAHA

 

  dessin Rosy Candau

 

 

 

 

 

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6 avril 2006 4 06 /04 /avril /2006 08:24

Je crée un nouveau personnage de poésie Zébane Fanfreluche. Vous pouvez m'envoyer des dessins pour le représenter lui qui ne ressemble à rien et va passer sa vie au fond du sac de la dame au sac(si un éditeur est intéressé je suis preneur d'une édition illustrée)

 

 

 ZÉBANE FANFRELUCHE  le doudou d'amour

 Zébane Fanfreluche est né
Au printemps nation
Dans un bac de peluches en solde
Où il était  seul
Sans étiquette de réduction.
C'était un signe.
Pas un cygne vraiment
Mi âne, mi zèbre, mi lion
Il venait d’un milieu très chiche
Où l’on  fabriquait des peluches
Depuis plusieurs générations.
Ni aigle ni oiseau mais mammifère c’est sûr
Il avait quatre pattes qui ne lui servaient pas
À courir dans la savane.
Zébane Fanfreluche
Causait l’amour comme vous le verlan
Et vous murmurait à l’oreille
Toutes sortes de mots
Que vous seul entendiez.
Aussitôt tous les mystères de la vie
Entraient dans votre pavillon
Et vous ne pouviez plus vous en défaire
Pour l’éternité.
C’était un magicien de la haute lande
D’un regard il faisait une histoire
D’un souffle un souvenir
Et vous sentiez jusqu’au plus profond
De vos sentiers secrets
L’appel du baiser.
De Zébane Fanfreluche.

 

ZÉBANE ET LES HÉLICOPTÈRES

 Un jour Zébane vit évoluer dans l’air
Un oiseau tout de fer
Avec des bras qui tournaient
Dans tous les sens de la girouette.
Un nuage de mauvais vent
Le cloua au fond du sac
Un bruit d’enfer lui fit faire
Trente tours par derrière.
C’est un hélicoptère
Lui téléphona son grand frère
Qui était resté au pays
Des animaux sans frontière.
Peut-être faut-il apprendre
Aux mammifères à drôle d’allure
Qu’il n’y a pas que leur silhouette
Qui étonne les passereaux
les marc
hands de camions.
C’est un hélicoptère
Entendit-il autour de lui
Comme on dit c’est un mirage
Quand on est perdu dans le désert.
La chose montait et descendait
Se prenait en libellule
Et cavalcadait dans les dunes
Du boulevard du clair de lune.
C’est un hélicoptère
Se dit Zébane tout attendri
Peut-être bien qu’il m’attendra
Si je retrouve Fadila
Et l’emmène manger des crêpes
Chez la grand-mère de Suzette.

 

PREMIER VOYAGE DE ZÉBANE DANS UN SAC

Il se retrouva dans un sac
Étonné de tout ce noir
Avec un poudrier plein de secrets
Qui se piquaient le nez
De poudre de perlimpinpin.
Il mit les yeux à la fenêtre
Et s’aperçut que dans la rue
pas un seul quadrupède
Ne lui ressemblait.
Ils avaient de petites oreilles
Et ne devaient pas bien entendre
Ce que disaient les fanfreluches
Dans le fond  noir de leur sac.
Ils avaient des poils  sur la tête
Et un peu sous les bras
sauf les femelles
Ce qui étonna drôlement  Zébane.
Pour rire il secoua ses grandes feuilles
Et la dame qui le transportait
Le fit prestement se planquer
Sous le poudrier en nacre.
Ils habitaient de grandes granges
Avec des ouvertures jusqu’au toit
Même qu’on voyait au travers
Sauf quand ils étaient tout nus.
Et qu’ils mettaient des fanfreluches
Pour occulter leurs ébats.
Ils avaient des carapaces
Telles tortue ou escargot
Mais qui allaient drôlement plus vite
Qu’ils appelaient des autos.
Toujours beaucoup pressés
D’aller faire quoi on ne sait où
Puisqu’il partait le matin d’un bout
Pour revenir le soir au même bout
Et tous les jours recommençaient.

OÙ ON DÉCOUVRE LE NOM DE BAPTÊME DE ZÉBANE

Quel drôle de nom Fanfreluche aussi
Quand Zébane l’apprit
De la bouche de la dame au sac
Il voulut savoir à tout prix
D’où venait son patronyme 
 
Comme on le fait dans les arbres 
 
Dits de la généalogie. 
 
Voilà lui répondit-elle sur un ton d’ironie 
 
Ton nom vient de mes poignets 
 
Sur lesquels il y avait 
 
Des bouts de fils échevelés 
 
Répandus dans tous les sens 
 
De la joie du verbe aimer. 
 
Oh les belles fanfreluches 
 
S’exclama le compagnon de ce jour-là 
 
À la dame au sac qui demanda 
 
C’est quoi des fanfreluches? 
 
Des accroche cœur ma belle dame 
 Il y en a comme ça sur tous les bras 
 
Des dames qui dînent en tête à tête 
 
Dans les restaurants capverdiens 
 
De la révolution des œillets. 
 
Comme l’animal  sortait à ce moment 
 
Du paquet cadeau de l’homme 
 
Il annonça fièrement 
 
Tiens voilà Zébane Fanfreluche. 
 
Ce baptême en vaut bien un autre 
 Dans la religion de ceux qui n’en ont pas.  

 

 

 

 

 

 LA RESSEMBLANCE

Tu ne ressembles à rien
Lui dit la dame au sac.
C’était  la pure vérité
Zébane ne ressemblait
À aucun animal connu
Dans tous les bestiaires du monde.
Il en conçu une légitime fierté
Et un grand désarroi
n’allait-il pas être toujours seul
Et vieillir dans sa vie
Comme n’importe quel glace
Couvert de poudre de riz
De poussière et d’ancienne image?
Il tenta donc de voir
De l’autre côté du miroir
Les animaux de son espèce
Et des espèces voisines
Qui vivaient au fond des sacs
D’un monde qui n’en manquait pas
Du sac Hermès au sac poubelle
Du sac Vuiton au sac à malice
Du SAC  politique au sac  de corde
Et du sac à vin à l’estaminet.
Il tenta donc de CONQUÉRIR
La clef des champs et des prairies
Des bois et des rivières
De la route et des libertés.
Mais ne la trouva pas
Tant son parcours de bête
Était déterminé
De longue date.

 

 

 

 

 

 

 

OÙ ON VOIT APPARAÎTRE LE DIEU

Quand le dieu de la confection pas chère
Créa notre animal étrange
Il visitait la Chine avec un président
Qui tentait d’y vendre une usine clef en main
De prêt à jouer délocalisée.
Il y était venu avec des PDG
Des journalistes d’arrière garde
Et des ministres de premier plan
Pour les photos.
C’était le dieu du commerce inéquitable
Comme on en voit dans les congrès
Dans les rencontres internationales
Et dans les séminaires où les dieux
Ne vont jamais d’habitude;
Il y fit tant de sites
Il y fit tant de discours
Il convertit tant d’ouvriers
Il y vit tant d’ouvrières aux petites mains
Et aux petits salaires
Tant de peluches mal finies
Tant de dragons en crinolines
Qu’il se trompa dans ses calculs
Et enfanta celui qui ne ressemblait à rien
Que tout le monde prit par la suite
Pour une erreur de stratégie.
On ne peut pas faire confiance aux dieux

Qui  sont  tatoués sur le côté
Made in china.

 

LES HIPPOCAMPES

 

Avant d’arriver au printemps nation
Zébane avait déjà voyagé
Sur un porte containers jamaïcains
Avec des matelots dont la salsa
Dévergondait les sirènes de la mer; 
 
La nuit il s’échappait de la cale
Pour monter sur le pont inférieur 
 
Saluer ses frères de galère 
 
Les hippocampes de la mer. 
 
Il trouvait
entre eux et lui
Et entre lui et eux 
 
comme
Une sorte de ressemblance
Tout à fait extraordinaire.
Ils avaient été conçus pour un autre monde.
Avec leur propulsion d’hélicoptère 
 
Leur tête de cheval 
 
Et un rien de fierté
Dans la majesté de leur démarche.
Dans la nuit des quarantièmes rugissants 
 
Les marins ne comprenaient pas
Pourquoi dans le sillage de leur bateau 
 
Autant de petites étoiles de mer 
 
Scintillaient en escadrilles
Belles comme la grande et la petite ourse. 
 
Et le matin ils gardaient dans les yeux 
 
Cent mille étincelles de noctuelles
Qu’ils ne parvenaient pas à effacer
Tout en regardant voler les hirondelles.

 

LE LOGIS DE ZÉBANE

 Quand vous passez la plus belle partie
De votre temps dans un sac
Il faut aller à l’école des bagages
Pour apprendre les gestes de survie
Qui sauvent le sel de vos journées.
La première année vous apprenez
À faire des trous dans le cuir
Dans tous les cuirs
Du plus léger au plus costaud
Du plus coriace au plus transparent.
Du crocodile à la peau de vache
Pour ne pas manquer d’air
Dans toutes les situations
Et voir à l’envers
Les dessous de cotillons.
Il faut bien une deuxième année
Pour apprendre à éviter
Les objets enfournés
Par la maîtresse du hangar
Qui vous cabosseraient;
Tant on peut entasser
D’inutiles babioles
Dans un aussi petit espace.
Et enfin une troisième année
Pour apprendre à réfléchir
Sur les mœurs et coutumes
De la propriétaire accidentelle
Du logis ou vous déroulez
Vos plus belles années
D’animal encore aimé
Inanimé.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA GUITARE DE ZÉBANE

 Zébane entendit un jour
Tapis au fond de son sac
Une mélodie mélodieuse
Qui ravit ces innocentes oreilles.
C’était un air fait de notes
Qui se détachaient en chapelet
Comme si on pinçait une corde
Avec des doigts de fée musicale.
Il passa la tête pour voir
Et aperçut une étrange forme
Affalé sur un sofa de rêves
Qui de sa main où il manquait des doigts
Caressait la musique
Comme on caresse une femme d’or.
Autour d’un feu de bois mort
D’étranges silhouettes bougeaient
En tapant des pieds sur le sol
Pour faire aller leurs accords
Jusqu’au centre de la terre.
Les mâles cambraient leurs petits culs
Les femelles les provoquaient
Mettant en avant leurs mamelles
Qu’elles avaient généreuses.
Il fut comme envoûté
Par le spectacle que lui donnait
Le bonheur en peau d’hérissons
De ces gens dit du voyage
Au point qu’il ne put plus jamais
Entendre la musique de Django
Sans qu’un frisson frise son échine
Qui n’en demandait pas temps
Pour prendre l’avion des rêves
Des mangeurs de lunes brèves.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ZÉBANE FANFRELUCHE ET SON DOUBLE

 La solitude de celui qui n’a pas d’image
Vient qu’il ne peut jamais rencontrer
Son double son clone ou celui
Qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau.
Zébane le cherchait en vain
Persuadé qu’il devait y avoir
Sur cette terre ou sur une autre galaxie
Un Zébane à lui sosie.
Un jour il crut le rencontrer
Mais ce n’était que le zèbre
Du jardin d’acclimatation
Qui ne s’acclimatait pas
À la pollution de Paris.
Il écrivit aux internautes
Aux astronautes
Aux astrophysiciens
Et à tous ceux qui parcouraient l’univers
En vaisseaux spatiaux ou en galères.
Ce qui lui fit rencontrer un poète
Cyrano de Bergerac
Qui était allé dans les étoiles
Avant qu’Edmond Rostand
Lui fasse don de Roxane
Et d’un nez qui n’avait pas d’image.
Ce qui lui fit croire
Que lui aussi ne ressemblait à rien
Et que c’était pour ça
Qu’il passait son temps
Dans le ciel
Comme lui dans son sac
Et aurait pu devenir son frère.

 

LA NOURRITURE DE ZÉBANNE

 

 

 

 

 

 

 

 Même quand on est dans un sac
Petit animal sans image
Il faut bien se nourrir
Pour ne pas dépérir.
Zébane mangeait
De la petite nourriture
Que la dame au sac
Jetait de temps à autre
Par inadvertance.
Des cacahuètes
Des boules de gomme
Des guimauves de toutes les couleurs
Des peaux de bananes
Des cachous Lajaunie
Qui parfumaient l’haleine
Des cosmétiques
Des anxiolytiques
Et des trucs en iques
Dont il ne parvenait pas
À déchiffrer le nom.
Par inadvertance
Il grossissait
Faisant craquer sa pelure de peluche
Prenant de plus en plus de place
Dans le sac
Tant et si bien
Qu’il fallut en acheter un autre
Pour aller visiter 
Le vétérinaire.
A la fête des mères

  

 

 

 

 

L’AMOUR

 

 

 

 Quand on est peluche
On n’est pas de bois
Et le printemps des amours
Travaillent aussi
La bête qui sommeille
En tout Zébane.

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26 mars 2006 7 26 /03 /mars /2006 08:33

Le numéro 25 de comme en poésie est paru.

SOMMAIRE

Page 2 : (édito) Jean-Pierre LESIEUR
Page3 : Claudia Ainchil
Page 4/5: Denis Emorine
Pages 6/7 : Véronig Simon 
 Page 8/9: Stella Radulescu
Page 10 : Jacques Simonomis
Page 11 : José Millas-Martin; Didier Ober
Page 12/13 : Claude Favre
Page 14 : Patricia Laranco, Bernard Lanza
Page 15 : Michel Lemercier, Gil joseph de Mamanro
Page 16 : Robert Momeux
Page 17: Georges Gachnochi
Page 18: Jean-Claude Touzeil
Pages 19 : Éric Dubois
Page 20: Éric Savina
Page 21: Laetitia Marcucci, Didier Leroy
Page 22 : Cécile Vinciguerra
Page 23 : Benoit Gastou
Pages 24 : dessin de Danièle Stremler
Page 25/26: Journal Jean-Pierre Lesieur
Page 27 : dessin de Danièle Stremler
Page 28 : Ferrucio Brugnaro, Don Alfieri
Page 29 : Gérard Lemaire
Page 30: Liska
Page 31: Patrice Maltaverne
Page 32/33/34/35 : Dessins légendés
Page 36 : Fadila Baha
Page 37 : lettre de Jean Rousselot, michelle Caussat
Page 38/39: Roland Nadaus
Page 40/41 : Critiques : Vercey, Lesieur, Machet
Page 42 : La pasticherie Claude Albarède, Pierre Covarel
Page 43 : Patrick Joquel, Michèle Bourgeais
Page 44/45 : Jean L’anselme
Page 46: Marc Bonetto
Page 47 : Pot au feu
Page 48 : Conseils et annonces
Page 49 : Comme dans les recueils
Page 50/51 : Comme en revues J-P.L
Page 52 : De vous à moi et de moi-z-à vous.J-P.L

 

 

  ÉDITORIAL  Jean-Pierre Lesieur

Est-ce qu’on peut agir en poète? Est-ce qu’on peut devenir un poète d’action? Pourquoi le poète serait-il un homme, ou une femme, différents des autres hommes et femmes? Est-ce que je vous en pose des questions, moi? Il doit bien y avoir la même répartition entre intelligence et connerie chez les poètes que dans une rame de métro bondée à 6 heures du soir. Vivre en poète c’est aussi écrire de la poésie. Ah bon on peut vivre en poète sans rien écrire. Je le crois aussi. Mais alors comment le prouver, s’il le faut. Pas facile. Il n’y a pas de comportement type, sauf peut être dans la conscience collective quand elle énonce, un vrai poète ou quand un chroniqueur sportif dit pour un joueur particulièrement agressif « c’est pas un poète ». De la douceur, de la tolérance  caractériseraient donc notre poète. Bon je prends. Pourtant un mec irascible ou sous influence qui tire un coup de pistolet sur un autre ne pourrait pas être poète et du meilleur tonneau, si j’ose dire? C’est que, bon revoyez ma rame à six heures du soir un peu plus haut. C’est que ce n’est pas facile de distinguer dans la foule... le poète.

Je me suis fait allumer par mes pairs, enfin mon père spirituel, pour la compréhension du poème. J’entendais l’autre jour une émission de radio où un reporter de Libé, Mordillat,  disait que la littérature c’était bon de ne pas la comprendre tout de suite, que la littérature demandait un effort. Qu’il n’avait pas tout de suite compris Ulysse de Joyce, qu’il s’était d’abord attaqué aux dialogues  et que ce fut Michel Butor qui lui en révéla toutes les arcanes et qu’ensuite ce roman devint pour lui lumineux. Je bats ma coulpe, sauf à dire pour moi, avec les surréalistes; que la poésie que j’aime ce n’est pas de la littérature. C’est autre chose. Un instant de vie poétique comme les instants en parallèles qu’Alain Frontier notait au jour le jour, à l’heure, l’heure, de sa compagne Marie-Hélène alors qu’elle le photographiait et dont il vient de tirer un bouquin de 412 pages, Portrait d’une dame aux éditions Al Dante. Des phrases sublimes, des phrases banales, dont le chroniqueur de Aujourd’hui poème dit que ce n’est pas de la poésie au sens ou on l’entend. Et oui il y a aussi de la poésie qui n’est pas au sens où on l’entend.

En parlant de ce mensuel de poésie, le seul un peu consistant à ma connaissance, j’aimerai bien qu’il cause  de ma revue pour que ses lecteurs sachent que dans mon petit coin de sud ouest il y a aussi de la poésie et un poète qui campe prés d’un lac avec une revue dans les bras.

Et je terminerai sur un vœu que tous les intégristes de quoi et de qui que ce soit nous fichent  la paix et nous laissent vivre en poète ou non, en religieux ou non, en athée ou en agnostique comme bon nous semble et nous les laisserons également vivre en paix avec leur conscience.Et vive le droit à la caricature de tous les dieux de la terre et d’ailleurs.

 L'amour en moi

L’amour en moi
fleuves qui surgissent
toujours vigoureux
toujours marchant
occasionnant des confusions
des pleurs d’enfants
de grands pleurs
qui me font rire
et c’est une bien belle habitude
je m’en étouffe même
mais c’est tellement nécessaire pour être vivante
leurs ailes d’anges
leurs hirondelles
leurs je t’aime et je t’aime
leur beau langage, si nécessaire
obligatoire
que si l’on venait et qu’on me disait
qu’aimer est laid
je ne les croirais pas.

  Claudia AINCHIL (poète d'Amérique centrale traduction de Marie-Christine SEGUIN)

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8 mars 2006 3 08 /03 /mars /2006 10:44

LE CAP VERT DU COIN DE LA RUE

 

 

 

 Le cap vert était au coin de la rue
L’Afrique n’était pas loin
Les convives détaillaient l’Atlantique
Dans les poissons de leur menu.
Des rythmes de saudade
S’incrustaient dans les assiettes.
Paris Sorbonne Censier
Déversaient les clients
Par couples bon vivants.
On n’aurait pas pu glisser
Une feuille de papier à cigarette
Entre les tables.
Les coudes les plus proches
Touchaient d’autres coudes
Armés de fourchettes  dangereuses.
Des rixes de victuailles couvaient
Donnant au micro-ondes sa part de chaleur.
Le cap vert était au coin de la rue
On pouvait le voir au bout de la lorgnette
Maigrichonne petite part de terre
Comme un îlot de chaleur
Dans le froid de la ville.
Pas entrés là tout à fait par hasard
Il et elle se tenant par la main
Comme deux amoureux transis
Sont venus rassasier
Leur faim de bonne chair
Dans tous les sens du terme.

 Jean-Pierre Lesieur le 11 février 06 écrit suite à un repas dans un restaurant capverdien près de Censier.

 

 

 

 

 

 

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25 février 2006 6 25 /02 /février /2006 08:46

Il y a quelques années parurent  dans la revue TRAVERS les aventures de PETIT PLUS; J'en donne ici une suite

 

NOUVELLE de Jean-Pierre Lesieur

 

 

LE GRAND VOYAGE DE PETIT PLUS                  à Olga

 

 

 

Petit plus habitait un grand village du nord de la France. Il vivait dans un paysage ou les terrils dépassaient les toits des plus hautes maisons. On avait donné à ces maisons ou plutôt à ces pâtés de maisons le nom de corons sans qu'on sache bien d'où venait cette origine. Il travaillait dans les mines de rien d'où il extrayait à la sueur de son front des mots qu'il n'arrivait pas bien à revendre. Son labeur le prenait à plein temps aussi n'avait-il pas vu arriver la retraite. Un drôle de mot d'ailleurs pour qualifier un nouveau départ dans la vie alors qu'on penserait plutôt à une défaite de Napoléon ou à la débâcle qui se produisit lors de la dernière grande guerre entre la France et l'Allemagne. Donc, quand Petit plus se trouva en face du fait accompli il lui fallut bien se résigner à quitter ses mines de rien pour songer à prendre un repos bien mérité qu'il comptait transformer en nouvelle activité à plein temps.

Il n'était pas question qu'il restât dans son grand village parce que le propriétaire des mines rejetait impitoyablement ses employés et ses ouvriers dès qu'ils avaient atteint cet âge presque canonique où ils devaient quitter leur emploi.

Il mit donc toutes ces affaires dans une grande malle où son imprimerie Jean-Pierre tenait une place importante avec les quelques livres dits de chevet dont il ne se séparait jamais. Il chargea son bagage sur sa vieille pétrolette, une antique guimbarde qu'il avait construite de ses mains avec un châssis de C quatre des roues de mobylette et un vieux moteur de vespa qu'il avait récupéré dans une décharge publique.

Il n'oublia pas de prendre Zebane Fanfreluche son animal de compagnie en peluche qui tenait du zèbre, du lion, de l?âne, et d'une dizaine d'autres animaux dont on ne pouvait pas formellement reconnaître les caractéristiques. Ce curieux quadrupède était né dans un grand bac rond du magasin Le printemps rempli de soldes et qui était le seul à ne pas être sacrifié sur l'autel de la réduction. Cette circonstance avait tellement ému Petit plus qu'il n'avait pu résister à l'irrépressible envie d'en faire son compagnon des bons et mauvais jours.

Quand  il eut liquidé tout ce qui lui restait de son mobilier vers un magasin Emmaüs en pensant à plus pauvre que lui, car ce sont toujours les pauvres qui donnent aux pauvres sinon les autres ne deviendraient pas  riches, c'est bien connu, ils se mirent en route vers un destin qu?il ne connaissait pas bien mais qu'il avait situé vers le sud  de la France.

Pour un homme du nord, le sud c?est aussi vaste que la terre entière mais on doit lui reconnaître une qualité les os apprécient la chaleur. Il sentait confusément, que les siens, avec ces ans qui avaient déjà pris une partie de l'outrage du temps en auraient bien besoin. Il  eut donc le choix, car il ne voulait dépasser ni la Méditerranée ni les Pyrénées entre le sud de la France et le sud de la France c'est-à-dire entre le sud-est et le sud-ouest.

Il jeta donc une pièce en l'air qui retomba sur le côté face et il en conclut que c'était le sud-ouest qui devait avoir l'honneur d'accueillir son équipage. Je n'entrerai pas dans les détails pour vous dire pourquoi il avait mis le sud-ouest en face et le sud-est en pile, c'était comme ça.

S'embarquer de nos jours, sur une vieille guimbarde, sur les routes de France, c'est une aventure que je ne vous conseille pas pourtant Petit plus ne reculant devant aucune difficulté pris la route un beau matin de mars car le printemps, pas le magasin mais l'autre, lui avait titillé la fibre de corsaire de la route qui l'habitait encore. Il évitait soigneusement les autoroutes qui eux ne l'évitaient pas ce qui le contraignit à faire moult  détours afin de trouver la route adéquate qui les enjambait ou qui glissait en dessous comme une taupe intelligente. Il eut aussi à faire face, si l'on peut dire, car il détalait dès qu'il apercevait le moindre képi à la maréchaussée. Ce n'est pas peu dire, de signaler qu'il n'est pas simple, pour un pauvre retraité, à la recherche d'un nouveau lieu pour sa  retraite de partir dans les conditions dans lesquelles petit plus s'était engagé. Il finit par ne plus pouvoir circuler que sur les sentiers, à travers champs, dans les forêts, contournant les zones humides et les marécages, et cherchant un bac pour traverser les fleuves et rivières.

Cette manière de voyager lui rappela que Stevenson avait effectué le même voyage avec un âne, ce qui lui mit du baume au coeur et l'encouragea à supporter toutes ces tracasseries qui en fait n'en étaient pas car nous ne savons plus guère voyager de nos jours où il faut aller à toute vitesse d'un point à un autre.

Cela lui permit de rencontrer des paysages magnifiques, des animaux extraordinaires, une flore luxuriante dont on n?a plus l'idée et de profiter des mille choses qui nous sont données par une nature à laquelle nous avons tout pris sans rien lui rendre.

Il passa donc de merveilleuses nuits dites à la belle étoile qui portait bien son nom. C'était un enchantement au point qu'il attendait avec impatience le coucher du soleil. Dès que celui-ci commençait à décliner sur l'horizon il se mettait en recherche d'un lieu adéquat si possible à l'abri des regards indiscrets, des gendarmes, et de ceux qui pourraient lui vouloir du mal. C'était parfois, une vieille cabane de berger, une grotte, un taillis touffu, une meule de foin ou une vieille grange et, merveilleux délices  une étable de plein champ dans laquelle ruminaient encore quelques brebis égarées. Il aimait, celles qui s'écartaient du troupeau, celles qui n'acceptaient pas, celles qui disaient jamais, celle qui voulait toujours avoir le temps de réfléchir, de ne pas se laisser faire bêtes bêtement enfin toutes celles pour qui la norme était trop énorme pour être honnête.

Quand on part ainsi à l?aventure, après avoir fait le vide de tout, on a l?impression d?entrer de plain pied dans un autre monde, un monde différent, un monde de pionniers et dans le cas de Petit plus un monde dans lequel il n?y avait rien à construire, rien à attendre tout à découvrir.

Après avoir bourlingué dans le ventre de la France il arriva dans un paysage qui n?était fait que de cépages, de raisins, de vignes et de châteaux. Qui n?a jamais rêvé de vivre dans un tel pays ? une immense contrée dont chaque maison s?appelle château : Château Ozone, château Cheval blanc, château Margaux, que des noms à faire rêver le moins poète des poètes.  Tout autour de ces châteaux on ne voyait pas grand monde, surtout des chiens qui vous dissuadaient efficacement d?aller rôder par là. Ce n?était pas un lieu des plus accueillants pourtant il y fit une rencontre qui bouleversa sa vie et lui fit faire une halte plus longue que ce qu?il aurait pu prévoir.

Une nuit, où il s?était endormi entre deux rangées de vignes, dans une cabane dont se servaient les bordiers il y eut un effroyable orage, avec des éclairs dans tous les sens qui illuminaient d?artifice les raisins alentours, lorsque soudain il entendit frapper à la porte qu?il avait fermée. Un coup discret, puis un autre puis une voix féminine mélodieuse qui lui cria ; « ouvrez, s?il vous plait ! ouvrez ! » il s?extirpa de son sommeil poussa le vantail et vit dans l?encadrement à la lueur des éclairs une forme de femme engoncée dans un ciré immense et jaune

-         dites donc monsieur que faites vous dans notre cabane ?

-         vu le temps je me suis mis à l?abri, comme vous

-         vous êtes sur une propriété privée ici

-         vous habitez là ?

-         oui et nous n?aimons pas beaucoup les vagabonds dans le coin

-         je ne suis pas un vagabond, je suis Petit plus et je vais dans le sud pour vivre au soleil de ma poésie. A ce mot de poésie la voix de la dame se radoucit      

-         vous êtes poète ?

-         oui, C?était bien la première fois que la poésie lui servait de laisser passer pour quelque chose.

-         J?adore la poésie, vous écrivez des vers

-         Ne restez pas sur le seuil, entrez vous n?avez rien à craindre de moi, oui j?ai écrit des vers mais il y a longtemps que j?ai arrêté, pourtant.

-         Pourtant quoi

-         Il y a des moments comme ça où on voudrait écrire encore. Il la dévisagea avec attention malgré la pénombre. Elle n?était plus toute jeune une bonne cinquantaine mais encore mince, élancée et avec des yeux dont il devinait la couleur plus qu?il ne la voyait, noisette. Son  côté écureuil qu?il avait longtemps dissimulé lui démangea l?orteil droit comme quand il ressentait une grande émotion.

-         Vous n?allez pas rester là pour la nuit venez au château nous avons une chambre d?ami vous y serez plus confortablement installé.

 

 

 

Le propre d?un  orage c?est de ne pas durer longtemps. Peu à peu les éclairs diminuèrent d?intensité le bruit alla décrescendo et il purent sortir de la cabane. Il ne se demanda pas que faisait cette femme en pleine nuit dans les vignes ni pourquoi elle lui avait proposé de venir dormir au château. Il la suivit.

La bâtisse dans laquelle il pénétra n?avait rien d?un palace, ni d?un palais, c?était une grande maison de maître à la mode girondine en pierre blanche du pays qui surgissait parmi les vignes comme un paquebot au dessus de la mer.  Il n?était pas au bout de ses surprises.

La dame qu?il contemplait maintenant dans l?entrée était plutôt jolie, des seins bien dessinés et assez charnus, une bouche lippue, un corps bien dessiné et une moue boudeuse qui lorsqu?elle parlait riait en laissant passer une pointe d?accent qui chantait en parlant. Il avait laissé son véhicule près de la cabane en espérant que personne ne lui déroberait. Depuis son départ il n?avait pas couché dans un lit et il eut peur de ne pas trouver le sommeil.

-         je peux dormir dans l?entrée, proposa-t-il

-         pas question je vous prépare la chambre

-         vous vivez seule ici

-         non avec les ouvriers et mes parents, mon mari est en voyage d?affaires, vous n?y serez pas dérangé.

-         Merci, c?est trop.

Il passa une drôle de nuit. A peine commençait-il à trouver le sommeil qu?on gratta à la porte. Tout d?abord il crut que c?était un chien ou un chat qui voulait entrer et n?y prêta pas attention. Comme le grattage se faisait plus insistant il se leva ouvrit la porte et trouva son hôtesse derrière en petite nuisette et un gros livre sur le bras.

-         tenez, dit-elle c?est un livre que nous avons dans la famille depuis plus de deux cent ans, lisez le nous en parlerons demain matin. Elle le lui tendit.

 

 

 

C?était en effet un superbe livre comme il en avait vu pendant son enfance aux distributions de prix, avec des dorures partout et des illustrations en gravures qui rehaussaient bien le texte. L?idée d?avoir à lire tout ce livre là en pleine lui ne l?enchanta guère au premier abord. Il avait été interrompu dans son sommeil, déjà, de plus il devait reprendre la route demain car il ne se voyait pas rester ici plus d?une nuit. Quand il referma la porte il l?entraperçut dans le couloir se dirigeant vers sa chambre laissant une traînée de parfum qui vint lui caresser agréablement les narines. Pas mal la dame pensa-t-il, car on a beau être retraité on n?en demeure pas moins homme.

Pourtant dès qu?il retourna vers le lit il se sentit irrésistiblement attiré par ce gros volume dont il put déchiffrer le titre en lettres gothiques : Les aventures de la princesse Saudade et du prince parfait. Il trouva que Saudade était un joli nom mais appeler un prince Parfait lui sembla du plus saugrenu.

Il se cala confortablement sur les oreillers se promettant de se réveiller plus tôt et d?en faire la lecture le lendemain matin mais malgré toutes ses tentatives il ne parvenait pas à s?endormir. Ce nom Saudade lui trottait dans la tête. Dans quel pays pourrait-on appeler une princesse d?un tel patronyme. Soudain il se souvint il avait déjà entendu ce mot dans un fado, ce chant que les portugais interprète avec nostalgie et qui vous fait pleurer l?âme en moins de temps qu?il en faut pour donner un baiser. C?était bien dans un fado qu?il l?avait entendu et il se rappela même qu?il y avait un rapport avec l?amour. Un  amour indéfinissable qui vous fait mourir de langueur. Il ouvrit la première page du livre?

Saudade une jeune princesse portugaise était mariée avec un coureur de jupons invétéré qui n?avait jamais assez de femmes dans son lit. C?était un seigneur cruel et querelleur qui avait pris femme parce que la religion lui en avait intimé l?ordre et que c?était la coutume. Une nuit arriva au château un jeune ménestrel qui n?était pas très beau mais avait beaucoup de charme et qui vous troussait le poème accompagné de son rebec comme pas un. Elle fut sous le charme. Il n?en fallut pas beaucoup pour qu?elle cédât aux sollicitations pressantes du jeune baladin d?autant que son seigneur était parti guerroyer dans quelques contrées lointaines de France pour on ne savait quelle dette d?honneur dont il se foutait comme de l?an quarante. Il lui apprit, ce que son mari n?avait jamais su faire, à prendre du plaisir et à entrevoir  l?amour physique autrement qu?en quatrième vitesse sur le coin d?un lit à baldaquin. En un mot comme en cent il fit d?elle une vraie femme et ce fut une révélation. Elle lui en voua une reconnaissance éternelle.

Le seigneur revenu le damoiseau dut décamper pour continuer à promener sa poésie de château en château et Saudade se retrouva bien seule mais une nuit de folie elle lui avait avoué tu es mon prince parfait et prince Parfait il demeura dans les yeux dans la vie et dans le lit de la princesse qui était bien souvent déserté hélas.

Un jour elle reçut une missive lui donnant des nouvelles de son baladin poète qui  contenait toute une série de balades, de rondeaux  et de sonnets qu?il  avait écrits pour elle il y avait même un pantoum. A leur lecture elle pleura abondamment et se jura d?aller le retrouver même au bout du monde s?il le fallait?

Le livre se terminait ainsi et il ne put jamais savoir ce qui était advenu des amours de la princesse et du poète.

Il s?endormit  alors que le petit jour essayait de devenir grand et fit la plus belle grasse matinée qui lui fut donnée de sa vie. A son réveil il sentit une présence dans la chambre, une respiration inconnue et un peu oppressée.

-         je vous regardais dormi mon ami vous avez un sommeil d?enfant

-         oh je suis confus

-         ne vous excusez pas j?ai une propension à me glisser auprès des gens sans qu?ils s?en rendent compte, c?est mon côté voyeuse disons contemplatrice

-         quelle heure est il ?

-         deux heures de l?après-midi, les ouvriers sont dans les vignes et nous sommes seuls ici, désirez vous prendre une collation ?

-         oui je grignoterai bien quelque chose.

-         Je vous l?apporte.

 

 

 

Elle disparut prestement pour revenir avec un plateau confortablement garni qu?il s?empressa de déguster avec une certaine avidité.

Pendant qu?il se restaurait elle s?était assise au bord du lit, se contentant de le regarder manger. Sa jupe fendue laissait passer ses jambes croisées qui avaient un galbe superbe. Ses yeux à lui  ne pouvaient pas s?en détacher. Elle s?en rendit compte mais fit comme si elle n?avait rien vu. Son repas terminé elle reprit le plateau le posa sur le guéridon sous la fenêtre et revint s?asseoir au même endroit l?empêchant ainsi de se lever.

-         vous avez terminé la lecture de mon livre

-         oui, mais c?est curieux il ne se termine pas bien il semble même ne pas se terminer du tout

-         non dit-elle énigmatique il reste encore un chapitre à écrire

-         mais l?auteur doit être décédé depuis belle lurette

-         je vous ai dit qu?il était dans la famille depuis longtemps et c?est l?un ou l?une d?entre nous qui doit l?achever. Ceci lui parut pas bien difficile il suffisait d?écrire le chapitre manquant

-         pourquoi ne l?écrivez vous pas

-         pas si simple mon ami il faut également que l?histoire pour sa vraisemblance soit vécue par l?auteur.

 

 

 

Un long silence s?établit entre eux. Cette femme l?intriguait et il sentait qu?il ne lui était pas indifférent. Un homme sent ses choses là il lui prit la main qu?elle ne retira pas. Après tout ils étaient tous les deux majeurs, vaccinés, seuls dans une chambre de cette grande maison et il avait l?impression très agréable de connaître cette femme depuis très longtemps, d?avoir déjà été en relation avec elle de l?avoir attendue et désirée en vain. Un coup de foudre.

Ce qui devait arriver arriva ils se retrouvèrent allongés l?un contre l?autre pour une étreinte extraordinaire qui lui fit crier à elle lors du moment le plus délicieux : «  mon prince mon prince parfait? »

Il se leva s?habilla se doucha et descendit la rejoindre dans le salon où elle l?avait précédé. Rien sur ces traits ne laissait transpirer le moment merveilleux qu?ils venaient de passer pourtant un bizarre sourire flottait encore sur son visage plus épanoui que de coutume. Il voulut prendre congé mais elle l?interrompit

-         non, non je vous garde quelques jours, nous dirons que vous êtes un ami d?enfance

-         mais votre mari

-         il ne reviendra que dans le courant de la semaine prochaine, vous n?y voyez pas d?inconvénient

-         bon si vous y tenez.

 

 

 

Elle y tenait tellement qu?elle le convia à aller chercher sa guimbarde, son imprimerie Jean-Pierre et son Zébane fanfreluche pour lequel elle se prit d?une passion soudaine et qu?elle trouva beau comme un camion. Il les gara dans la cour de la propriété.

Petit plus sentait bien qu?il y avait anguille sous roche, comme on dit, mais il ne vit pas venir le coup.

Quelques jours plus tard, alors qu?ils avaient vécu des nuits et des jours de feu, d?une « torridité » dont vous ne pouvez avoir l?idée il se dessina le retour du mari et Petit plus n?avait pas envie de l?attendre dans la maison de la belle. Il craignait pour lui-même et puis cette situation de vaudeville ne se prêtait  bien à drame que dans le théâtre de boulevard. Il sentit qu?il était alors temps de s?en aller.

-         je viens avec toi lui dit-elle la veille du retour de l?autre.

 

 

 

Il s?attendait à tout sauf à ça. Tout d?abord il refusa lui montrant sa vie d?errance, sa voiture ni faite ni à faire la précarité de sa situation actuelle son âge plus canonique que le sien sa petite retraite de mineur de rien

-         j?ai de l?argent dit-elle en lui montrant sa carte bleue et un chéquier et joignant le geste  la parole elle attrapa une grande valise enfouit dedans un maximum d?affaires personnelles lui demanda de l?aider à la charger sur la guimbarde et les voilà partis tous les deux sur la route sans trop savoir ce qui  allait advenir.

Elle laissa un mot dans l?entrée sur la commode : « adieu je pars pour le sud vous donnerez des nouvelles bientôt. »

Elle embrassa ses parents qu?elle n?avait même pas mis dans la confidence.

Le voyage que Petit plus avait commencé tout seul se continuait donc à deux, c?est seulement peu à peu qu?il se rendit compte que mine de rien, comme on disait dans son village, elle était en train d?écrire le dernier chapitre du livre et lui en devenait un acteur à part entière.

Ils continuèrent donc d?aller à leur rythme obliquant plutôt vers le sud ouest dont ils traversèrent une immense forêt, la plus grande de France : les Landes.

Là ils n?eurent aucun mal à conduire la guimbarde par les routes forestières et les sentiers. Ils rencontrèrent des gemmeurs, des chevreuils une quantité incroyable d?écureuils, des oiseaux de toutes espèces, des lapins et des lièvres. Ils étaient arrivés, sans que leur incroyable attirance l?un vers l?autre n?ait cessé, à vivre en osmose avec la nature et avec eux-mêmes. Le calme de la forêt les airials désaffectés qu?ils découvraient au hasard et où ils se cachaient pour des nuits merveilleuses les enivraient.

Ils mirent plus d?un mois à traverser ce pays enchanteur lorsqu?ils parvinrent à la fin de la forêt et débouchèrent sur un lac, un étrange lac qui se vidait et se remplissait à horaire régulier, comme les marées si bien qu?ils crurent être parvenus au bord de la mer. Elle leur sembla un peu petite parce qu?ils pouvaient apercevoir la rive d?en face ce qui n?est pas possible dans la mer. Ils résolurent d?en faire le tour et se rendirent compte qu?un canal prolongeait le plan d?eau et qu?au bout de ce canal c?était effectivement une grande immensité d?eau qui se prolongeait aussi loin que le regard pouvait porter.

Ils comprirent à la douceur et à la beauté de l?endroit qu?ils avaient atteints le but de leur voyage. Petit plus n?en croyait pas ses yeux. Même dans ces rêves les plus insensés il n?aurait pas pu croire qu?existait un lieu d?une telle beauté, d?une telle douceur, les gens qui habitaient là devaient tous être très beaux. Ils étaient arrivés à Hossegor.

Ils trouvèrent sur le bord du lac un bateau de pêche abandonné qu?ils occupèrent illico en faisant un lieu provisoire d?hébergement. Provisoire car bien vite les gendarmes leur firent comprendre qu?ils ne pouvaient pas rester là, ils se réfugièrent dans une petite maison qu?ils louèrent près d?un pont où avait vécu naguère un passeur que le pont avait contraint au chômage.

Ils auraient coulé de nombreux jours dans la plus douce des béatitudes si la vie et la légende ne s?étaient pas chargées de les rattraper.

Le mari, rentré de voyage avait trouvé le mot et craignant qu?il soit arrivé quelque chose de grave à son épouse avait fait lancer un avis de recherche ainsi conçu : Reviens,   te pardonne tu as écrit le dernier chapitre du livre?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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18 février 2006 6 18 /02 /février /2006 10:13

 

  Béatrice Machet

A UN JEUNE POÉTE pour Nicolas avec trois mots empruntés à E.Koechlin (extrait de comme en poésie

 

 

Tu écris : coeur cassé.           

 

 

 

N’essaie pas d’en ramasser les morceaux. Encore moins de les recoller; C’est de cette blessure nourricière que tu tireras les forces de vivre. On meurt peut-être plus sûrement d’un travail de deuil que d’un coeur cassé. Je veux dire par là qu’il faut garder en soi la fidélité à l’insoumission; même si le coeur casse, il continue de battre de cette force d’irruption. Je veux dire  que la résignation est une mort prématurée. L’accord est possible, avec le coeur cassé aussi bien, qui sait dire ou gueuler : oui. La casse d’un objet, à l’échelle du temps humain, le promet à la poubelle. La casse organique ou symbolique, à l’échelle du coeur, se métamorphose en vivant, en un bouquet multicolore d’étincelles qui narguent les jamais et les oublis, les pâleurs et les mollesses, les tiédeurs et les lâchetés.

 

Coeur cassé mais pas d’accomodement, la fuite pour faire face. Le saut sourd par les fêlures ou les failles  que le trop grand élan de vivre a provoqué. C’est une immense chance. C’est par ces anfractuosités qu’une luciole se glisse. Laisse la courir vers ce que tu cherches. L’incréé est en toi qui veut sortir.

 

Le coeur a percé la poche des eaux. Tu peux naître à ce qui jamais ne fût circonscrit. Tu en as enfin fini de l’enfermement.

 

Tu as le vertige. Tu as la sensation d’avoir perdu ton centre de gravité. Bien sûr puisqu’il est en l’autre. Mais peu importe,sculpte devant toi les totems tutélaires sur lesquels appuyer ton épaule les jours de tempête.

 

La terre enfouit toutes les misères. Tout humus, tout terreau est fait de ces mémoires meurtrières ou assassinées. Mais elle permet aussi que resurgissent, au dessus des charniers, des fleurs pour rien, des fleurs sans raison, traversées par la joie simplement d’être. Sois une de celles là quelquefois.

 

Ne crains pas le vent. Il n’apporte certes aucune consolation, mais il lève les braises et fait luire les signes. Ne fuis pas la pluie, c’est elle qui te lave et permet que les peaux mortes glissent à terre, ses cycles toujours recommencés pour te rendre au monde, neuf sans cesse.

 

Pour que la terre tienne ses promesses, pour que la glaise, cette argile molle et trompeuse te fasse homme, il te faudra cuire, passer par le feu. C’est un long bonheur, le feu. N’aie pas peur d’y brûler tes ailes. Elles deviendront des bras capables d’aimer. C’est comme cela que tu t’envoleras. Saisi par son souffle.

 

Aime l’absence. C’est elle qui s’en vient chatouiller la plante de tes pieds. Et te soulève. Et suscite ta saine impatience. Mets toi en marche tout animé d’absence. Obéis à l’appel archaïque, il te conduira là où tu feras les choix décisifs. Parfois le pas crisse, parfois il grince, ou s’enfonce. Rive-le à tes hanches. Soumets-le au mouvement de ta main qui elle aussi arpente. Mais en conscience, avec l’esprit de qui se libère.

 

Respecte ton corps. Il est le seul repaire où des forces étrangères pénètrent pour allumer de torches étoilées. Elles te rendront l’univers familier.  Aime ton corps, il est ton seul repère.

 

Irrépressible. Le désespoir s’en vient parfois t’envahir. Assigne le à son poste de guet. Là, il te rendra de fiers services, puisque père de la lucidité. S’il s’en vient sous ta langue, laisse le crier ou chanter. Une fois soulagé, il se taira et s’endormira sereinement.

 

 Ne rechigne pas quand  la sédentarité s’impose. C’est que tu es devenu le carrefour par où voyage l’air du temps. Il lui faut des balises, offre les lui. Car c’est en toi qu’il découvre l’envie, qu’il autorise à vouloir n’être pas banal.

 

              Caresse longtemps l’inertie. Sois tendre, indulgent avec elle. Après le plomb vient l’écume. Le galop sauvage sera la récompense, qui fera saillir muscles et idées. Tu jailliras  nu et désentravé. Tu connaîtras la trajectoire  du rayon de pure lumière, tu éprouveras la force pure de la joie.

 

              Cultive cependant quelques liens. Jamais les laisses. Les premiers te laisseront partir, les derniers te retiendraient.

 

Étudie les rebours qui contiennent les tourbillons de rage. Tu peux en avoir besoin pour te propulser en avant.

 

Réjouis-toi de la décomposition. Son avancée vers l’informe t’entraîne là où le germe pointe. On peut déceler un sourire dans la pourriture, le desceller c’est faire du tombeau un berceau de vie.

 

On ne peut pas se départir du gravir. Naître sera toujours franchir un col. Nous le ferons sans crime et sans rocher

 

Haleter précède toujours l’imminence. Perdre haleine alors pour quelques instants fulgurants. A condition de ne pas chercher à oublier l’insécurité fondamentale de vivre. L’inconfort de naître va de pair avec le plaisir et l’ivresse des cimes.

 

Chéris la solitude. Cet invisible ressort ébauche en retrait, un monde d’eaux vives et de paroles dénudées. La source est en elle, qui n’exige aucune échéance. Nulle preuve, aucune certitude, mais la solitude et ses paysages contrastés. Autant de visages aimés, veilleurs diaphanes, silhouettes restituées, qui font étape en ses châteaux fortifiés.

 

Considère le mot comme la mesure possible des rapports fondamentaux du ciel et de la terre. L’oeil et son relais, mot ou pinceau, pas de danse. Et puis guetter la métamorphose. Y participer de tout son être, c’est respirer comme on écrit.On trace un trait : on aspire à la ligne.

 

La légèreté n’est pas affaire de poids ou de volume. Bien plutôt de messages clairs. L’iris, l’écrit, la danse, créent de la transparence, aèrent. Et l’amour emprunte au papillon ses ailes pour accomplir sont art.

 

Tu dis : je me bats contre moi. Cette lutte est bonne. Elle t’envoie à la rencontre d’autrui. Viendra le temps où tu te battras pour au lieu de contre, alors tu auras franchi le gué, contourné le cap, détourné l’obstacle. La philosophie bouddhiste enseigne à remercier ses ennemis, eux seuls nous obligent à progresser.

 

Tu dis : je me bats contre l’écriture. Je comprends moi que tu consens les efforts pour en être digne. C’est ingrat parfois, c’est troublant souvent, c’est toujours se hisser au meilleur de soi-même. Compte sur moi pour t’y encourager. Le coeur à l’ouvrage en toutes circonstances est synonyme d’harmonie.

 

 

 

Automne 2003

 

 

 

 

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9 février 2006 4 09 /02 /février /2006 11:11

ESSAI DE NON PHILOSOPHIE POUR INADPATÉ À LA CONSOMMATION NORMALE

 « suis-je, ou ne suis-je pas », le vieux dilemme un consommateur? somatique m'en vôtre pour vous servir et me servir, bien de préférence, consommateur modèle.
             Si l'on décompose, le con sommateur est une race en voie de pullulement intensif  qui abonde particulièrement sur la côte de Somalie. Ce qui est faux car il est de notoriété publique qu'en dehors d'un certains négus, les autres la sautent sauvagement. (Des ethnologues très sérieux, défendent malgré toute une hypothèse : en étudiant les grands courants de migration imbriqués dans les courants marins, ils auraient pu entraîner à la dérive un radeau de Somaliens vers nos côtes occidentales, transformant ses occupants en consommateurs ayant perdu la boussole).
                Ainsi naquit le consommateur qu'on rencontre dans les villes l'oeil aux aguets partiellement rivés sur la ligne orange et néon des supermarchés à succursales multiples qui se super multiplient.
Mais attention ! Il ne faut pas confondre le consommateur et le con vulgaire (connus vulgarus) et sa connasse vulgaris, la femelle qu'on peut appréhender à mains exemplaires dans n'importe quelle boutique particulièrement à la mode dite aussi shop où se brocarde n'importe quoi.
La tenue vestimentaire du sommateur, se différencie de celle du vulgaire, par le port ostentatoire d'une musette ou d'un sac à dos de grande capacité. Au niveau du pectoral gauche, un renflement proéminent doit faire apparaître la forme indélébile d'un portefeuille bien garni. Le vulgaire se contentant d'une bosse porte-monnaie sur la fesse gauche, nettement plus réduite.
              Un autre moyen infaillible de reconnaître le sommateur est le borborygme qu'il ne cesse de psalmodier  : "j'fais un chèque! j'fais un chèque" et si vous parvenez à en faire le tour, une  tache rectangulaire patronymée "carte bleue" doit être fixée sur son revers. Une pratique courante du sommateur consiste à scruter attentivement  les calicots et enseignes qu'il est loisibles de dévisager au long des artères passantes. Trois seulement retiennent son attention : Soldes, liquidation, changement de direction. A leur vue il s'arrête comme un chien courant ayant flairé une palombe sur l'autoroute A10. Jette un regard hexagonal pour être certain de ne pas être filé par un con génère (con génitus une race qui est toujours en train de mettre ses appareils de reproduction dans la boutique des autres) et quand il est certain de son incognito intégral se précipite dans le piège. Car piège il y a. Il en ressort toujours... avec un pull, trois paires de chaussettes et un soutien-gorge dont il n'a que faire, n'étant ni hermaphrodite, ni en puissance de le devenir. Il n'achète pas, il gaspille, il gadgette, il galope à pleines pattes sur le premier brimborion venu, il gâtouille généreusement avec des riens multicolores qui ne lui servent à rien, il dévalise. Ensuite, il entasse le total dans une vieille malle inutilisée, pour laisser quelques vestiges de son activisme  de luxe superflu à sa descendance.

              C'est pour lui, et pour lui seul, que furent crées, les "sex-shop". Les autres races de Cons se débrouillent fort bien avec un peu d'imagination créatrice, des arguments naturels  et une bonne dose d'optimisme, pour profiter, quand même, des rares moments de plaisir que la vie peut offrir. Lui pas. Il panoplise régulièrement une grande quantité de bidules destinés à ne pas lui faire oublier que même dans un lit il consomme.

              S'il est très riche, sa femelle peut toujours faire appel au con génitus, beaucoup mieux armé que lui pour ce genre d'exploit. Un principe les services de ce dernier (ou de cette dernière) doivent toujours être rétribués mais il y a des exceptions qu'entre eux ils appellent : adultères. On ne paye pas, mais il est de bon ton de se faire des petits cadeaux.
               Le sommateur  lit parfois : « l'art de piper les dés » « la bourse en 15 leçons » « les guides bleus, blancs, rouges » «le Gault et Millau » « le Michelin » «le Pudlo » enfin tout ou presque notre patrimoine littéraire de grande consommation. Il a une prédilection pour les bouquins qui se lisent vite , s'avalent, permettent tête des performances (trois livres par nuit insomniaque), n'encombrent pas ses sièges cervicaux et ne menacent en rien sa riche nature de dévoreur.
             Pour le lecteur qui aura pris la peine de lire notre titre, il paraîtrait évident que la philosophie énoncée dans les lignes précédentes et comparée au spinozisme, au marxisme, au kantisme, à l'existentialisme et à toutes les autres, ne semble à courte vue pas très sérieuse. Pas de principes éternels et transcendants, pas de vocabulaire incompréhensible. Du constat, du vécu ou presque. Les grandes orientations s'en dégageront  plus tard sous la poussée et fiévreuse des exégèses.
La transformation de l'inadapté en con sommateur, se fait souvent sans que l'on n'y prenne garde, sous l'influence d'une osmose rampante, sournoise et dangereuse.
              Méfie-toi, lecteur, regarde, autour de toi, en toi... N'es-tu pas déjà en puissance de la première syllabe... Sois sincère. Prends garde !

EXTRAIT DE MANUEL DE SURVIE POUR UN ADULTE INADAPTÉ éditions Gros textes

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5 janvier 2006 4 05 /01 /janvier /2006 09:45
  Cette lettre peut être copiée par les revuistes qui le désirent et envoyée à qui ils veulent en ayant la courtoisie d'en spécifier l'origine, la revue et l'auteur; Merci.
                                                                                                         DATE DE LA POSTE

Cher poète. 

              Je réponds enfin à l’envoi de vos poèmes et je vous prie d’excuser le retard de cette réponse. Je reçois en effet énormément de textes à croire que les poètes poussent comme des champignons dans les sous bois par temps d’orage en automne.
               Sachez que je privilégie dans les auteurs ceux qui n’ont pas envoyé leurs poèmes à l’aveuglette c'est-à-dire après avoir longuement fréquenté, en tant que lecteurs les différents numéros de poésie que j’ai publiés depuis la naissance de la revue.
              
Je donne aussi ma préférence aux poètes qui m’envoient des textes inédits en recueils et en revue car les abonnés étant tous ou presque  abonnés à plusieurs revues ils n’aiment pas, et je les comprends, retrouver le même texte au même moment dans plusieurs. Bien que Jean L’Anselme, vous connaissez peut-être, dise que si la guerre de 40 n’avait été annoncée que dans un seul numéro de revue de poésie il n’y aurait pas eu grand monde pour défendre la France.
               
La poésie que je défends et pour laquelle vous en conviendrez  je donne beaucoup de temps et d’argent ainsi que pas mal d’amour ne se réfère à aucune chapelle, je ne peux être une tendance ou une école à moi seul  j’accepte toutes les formes et fonds de poésie, pourvu qu’elles me fassent vibrer, qu’elles élèvent ma pensée et qu’elles me donnent ce je ne sais quoi indéfinissable qui me fait dire : « là il y a un véritable écrivain. »
               
Choisissez vos textes les plus aboutis, ceux que vous feriez lire à votre petite amie, votre belle-mère ou le secrétaire perpétuel de l’Académie, les autres, laissez les mûrir ou mourir au fond de votre tiroir celui que vous n’ouvrez que pour les grandes occasions.
               
Ne tenez pas pour acquis qu’un abonnement à la revue vous donnera automatiquement droit à une publication. Je revendique hautement le droit de refuser un poème qui n’entre pas dans le cadre de la revue au propre comme au figuré c’est ma liberté de directeur et la votre sera de rechercher une autre revue afin de voir enfin publié le joyau de la poésie que je vous ai refusé. 
                
Par contre s’abonner à une ou plusieurs revues me paraît le meilleur moyen pour connaître, lire, apprendre la poésie qui se fait aujourd’hui  sans compter que vous aurez le devoir de faire vos classes sur le tas, nulle école de poésie ne donnant des cours du soir en ce bas monde ni dans l’autre. Il existe suffisamment de revue spécialisées, d’ailleurs il n’y a qu’elles pour éditer des poèmes, pour que vos écrits  puissent être acceptés ici ou là.
                
Méfiez vous des revues qui vous demandent une participation financière pour la publication, un compte d’auteur sournois et diffus, rôde aussi  dans  les bas-fonds des revues.
                
Choisissez de préférence une revue qui n’est subventionnée par personne d’autre que son animateur et ses abonnés, les autres sont trop dépendantes d’une subvention qui si elle disparaît fait également disparaître la revue. Je pourrais citer de multiples exemples.
                
N’attendez aucune rémunération de la part des directeurs de revues qui tirent déjà le diable par la queue. J’ai tenté moi-même de donner un euro par page publiée dans la revue et je me suis fait ramasser par la confrérie des poètes qui ne veulent pas êtres payés, prétextant que c’était une aumône, d’autres ont crié au loup car il n’est pas bien dans le paysage qu’un poète écrive pour être payé. (certains ont tout de même accepté et je les en remercie) 
                
La solidarité entre les revues n’existe pas. Elles sont définitivement rivales puisqu’elles publient les mêmes poètes et ont les mêmes lecteurs, un abonné qui se désabonne devient un abonné en puissance pour une consœur.
               
Ne m’envoyez pas un recueil complet en me demandant de choisir le ou les poèmes que je préfère il n’y a aucune chance que je l’édite en entier et il me faudra tout lire ce qui prend énormément de mon temps très précieux  le choix c’est à vous, aussi,  de le pratiquer. Quelques textes suffiront pour que je me fasse une opinion sur ce que je pourrai mettre ou ne pas mettre dans la revue.
               
Pensez que je possède un petit budget et qu’il ne m’est pas possible de répondre à toutes les lettres si vous ne me mettez pas au moins un timbre. La poste pour une revue qui ne peut  être diffusée autrement que par abonnement représente une dépense onéreuse qui ne peut qu’augmenter au fur et à mesure de la privatisation. Reconnaissez qu’un timbre pour savoir si on va être édité ce n’est pas cher payé.
              
Si vous voulez que vos textes soient rigoureusement retranscrits évitez les manuscrits illisibles surtout si  votre écriture se rapproche plus de celle du chat que de celle d’un calligraphe de renom.
              
Sachez que d’être édité dans une revue de poésie n’ouvre pas automatiquement le droit à la célébrité et à  la gloire laissez cela à la star académie ou autres émissions de télé ni que vous accèderez d’un seul coup au pinacle de l’édition à compte d’éditeur. Il vous faudra encore solliciter de nombreuses autres revues et il y en a même qui oseront refuser vos textes.  La poésie est un long chemin de croix qui comporte beaucoup plus  de stations que pour l’autre.
              
Si vous êtes refusé n’en faites pas une maladie de peau, il y a plus grave dans la vie, une autre revue prendra vos poèmes c’est seulement que vous n’avez pas frappé à la bonne porte.
              
Parfois se recommander d’un poète déjà un peu connu  peut influencer le directeur mais méfiance il y a peut être entre eux de la brouille dans l’air ou un conflit larvé que votre petite allumette a su réactiver.
              
Ne soyez pas trop élogieux à mon égard ni à l’égard de la revue, je sais que c’est une bonne revue, mais la flagornerie n’a jamais remplacé le talent. Allez-y mollo dans l’éloge prépublication ensuite vous pourrez vous laissez aller.
             
Soyez patient les délais de publication vu le nombre de textes que je reçois et la pagination de la revue sont un peu longs ne me relancez pas au téléphone tous les trois jours ni par courrier toutes les semaines, cela ne servirait à rien.
            
Si vous avez scrupuleusement suivi ces quelques conseils il n’y a aucune raisons pour que vous ne paraissiez pas dans un prochain sommaire de la revue et qu’on vous y retrouve assez souvent car j’aime bien suivre les poètes dont j’aime les textes qui deviennent aussi fréquemment des amis.

                                                                           COMME EN POÉSIE /Jean-Pierre Lesieur

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

             

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