LES AMIS DU POÈTE
Les amis du poète passent dans sa tête vêtus de lin blanc et de probité candide une mauvaise idée dans la manche
Les amis du poète gravent sur les arbres des cœurs de pacotille qui s’envolent en riant quand passe un rossignol
Les amis du poète viennent le samedi soir lui jouer une sérénade qui efface les frontières d’un seul coup de violon
Les amis du poète secouent le cocotier qu’il cache dans sa tête pour la belle vahiné qu’il n’a jamais aimée
Les amis du poète tentent de le surprendre dans la surprise des cris que la musique invente quand il vend ses poèmes
Les amis du poète tournent les premières pages d’un recueil non fini qu’il accompagne toujours au pilon de la vie
Les amis du poète ont des têtes de faux culs et des cols empesés qui font monter leur cou au sommet des épaules
Les amis du poète se bercent d’illusions sur le devenir rance qu’il affiche pourtant quand la postérité le montre de sont doigt
Les amis du poète dégagent une suffisance qui ne suffit jamais à déglinguer le temps pour toute éternité
Les amis du poète ont des voitures bleues pour qu’on ne les confonde pas avec des morceaux de firmament stellaire
Les amis du poète courent chaque matin autour du lac marin qui monte et redescend comme un ascenseur sirène
Les amis du poète glanent des petites images dans les champs magnétiques qui changent chaque printemps
Les amis du poète réunissent des fonds pour donner aux revues qui ne publient jamais que ses fonds de tiroir
Les amis du poète déglinguent la recette qu’il ne touche jamais aux usines Montparnasse de l’ouvrier des lettres
Les amis du poète tournent toujours à droite quand ils se carrefour pour cacher leur honte dans un bosquet de buis
Les amis du poète viennent à son enterrement pour montrer qu’ils regrettent qu’il soit parti si tôt sans laisser de sillons
Les amis du poète ont des chevilles grosses qu’ils lui prêtent parfois quand il ne sait pas comment finir ses vers
Les amis du poète déversent dans les fleuves le bateau de Rimbaud qui avait trop bu d’absinthe frelatée
Les amis du poète changent en douceur les couches de l’histoire qui n’ont de littéraire que l’absence de prince
Les amis du poète dissimulent son crâne sous des cheveux d’anges qui n’ont pas de sexe aux babouches de l’histoire
Les amis du poète maquillent des motos qu’ils enfourchent matin pour les vingt quatre heures de l’amitié moutarde
Les amis du poète balisent les voies lactées pour qu’ils ne se perdent pas dans le maquis touffus de l’édition blême
Les amis du poète hésitent entre deus pôles qui fondent en douceur sous le poids du soleil qui troue toutes les ozones
Les amis du poète restent toute leur vie au chevet de l’envie qu’ils avaient envoyée voir les quatre cent diables
Les amis du poète dégagent sur la touche les recueils de ceux qui veulent prendre le pouvoir de la poésie à faire
Les amis du poète se réunissent en cercle afin de disparaître le plus rapidement possible dans le simple appareil
Les amis du poète arrivent chaque week-end pour l’obliger à dire que la fin de semaine n’est pas anglo-saxonne
Les amis du poète dansent sur le buffet du gueuloir inventé par les sourds-muets de la maison aphasique
Les amis du poète l’invitent pour les fêtes quand le vent de l’histoire tourne du mauvais côté des copains d’abord
Les amis du poète brisent les tabous qui entourent un monde que personne ne veut mettre dans sa besace blonde
Les amis du poète calculent la quantité de pommes qu’il faudra pour presser le cidre de son avenir
Les amis du poète l’entourent d’affection pour qu’il n’aille pas ailleurs chercher de fausses joies à l’envers du langage
Les amis du poète l’embrassent sur la bouche une seule fois par an quand il prend l’âge que n’ont pas ses artères
Les amis du poète le suivent sur internet pour connaître son blog qui débloque souvent les mains de l’amitié
Les amis du poète n’ont pas toujours su le protéger du verbe mais ils sont quand même bien présents dans son cœur.