L’amour fin de Vincennes
pour O.
Une branche de mimosa alanguie de voyage
Plantée sur l’orme pelé de miroir du parc
Est venue embaumer les yeux de paradis
Des canards siffleurs de la sauvage prairie.
Le livre portugais d’une poétesse aveugle
Découpait en morceaux d’écoute le parcours
D’une femme qui aima un homme plus que tout
Là sur un banc de la Porte Jaune de Vincennes bois.
Une autre fit tuer par son amant le mari innocent
Dont elle ne voulait plus dans les ruelles de son cœur.
L’amour fin celui dont on a faim à ne plus savoir
Ecrire le mot tant il dérive dans la tête
L’amour fin l’enfant des voyages trop courts
Tu me l’as donné avec ton corps de soif intense
tressautant sous mes doigts guerriers de feu
qu’un barbier de cinéma en vengeance
aurait voulu couper de ces ciseaux multiples.
Le gnou et le corbeau faisaient ménage à trois
Avec le plan des incompréhensions de vie
Et au loin les vautours attendaient une proie
Qui ne venait jamais dans ce zoo d’autre monde.
L’amour fin prit à bras les ailes de
l’ange capucin que nous avons frôlé
le bel amant des amendes d’autoroutes
Qu’un seul petit frisson devait mettre en déroute.
Sur le pas des cascades que les mots relayaient
S’obstinaient des croupes à combler de caresses
Et mes mains s’épuisaient en milliers d’offrandes
Toutes plus intimes les unes que les autres.
Il y avait dans ce ciel aux vents incertains
Comme un parfum de rêve et de réalité
Qui décoiffait le cœur dans un bruit de sourdine.
L’amour fin descendait de la dune un poème
dans chaque regard où se mouraient les yeux
Des passants étonnés par des éclairs d’os.
Qu’un cygne au port en devenir puisse
ouvrir l’horizon d’une clef à la hanche
procurant aux passants un judo éphémère
qui ne menait nulle part dans le sens des flèches.
Et toutes ces girafes de démarche majestueuse
Qui venaient manger dans nos mains apprenties.
Jean-Pierre Lesieur